Faire découvrir la culture mathématiques et créer du lien : retour sur le stage MathC2+ de l’Université Picardie Jules Verne

Faire découvrir la culture scientifique aux jeunes, tel est l’ambition de Fabien Durand. Ce professeur de l’université de Picardie Jules Vernes met en place régulièrement des stages pour des élèves issus des zones prioritaires (REP+). Le dernier en date, organisé début juin dans les locaux de l’université, a permis à 29 jeunes de rencontrer professeurs et élèves. Il revient pour nous sur ce projet de vulgarisation.

Bonjour, pouvez-vous vous présenter et dire un mot sur la Société Mathématique de France (SMF) dont vous êtes président?

Je suis enseignant chercheur à l’université de Picardie Jules Verne. Je suis actuellement et depuis 2 ans président de la SMF, qui est une association de loi 1901, créée en 1872. Elle regroupe essentiellement des enseignants chercheurs. L’association s’ouvre depuis 30 ans à des activités de vulgarisation vers le grand public, à la parité dans le métier, aux droits humains : nous avons par exemple des collègues mathématiciens emprisonnés ; alors qu’au départ nous étions des éditeurs et diffuseurs d’informations de résultats mathématiques.

Comment vous est venu l’idée du stage ?

Depuis 2 ans nous avons repris l’organisation du stage mathC2+, au départ organisé par Animath et la Fédération des Sciences Mathématiques de Paris, qui fédère les initiatives dédiées aux maths. Nous signons également une convention avec le Ministère de l’éducation nationale. Nous devons en revanche gérer la diffusion et la partie financière. Nous recevons aussi des aides de la part de la Fondation du Collège de France et du CNRS par exemple, ce qui permet de payer les frais d’hébergement, de repas, transport etc. aux participants.

Est-ce la première fois que vous en organisez un ?

J’en organise assez régulièrement depuis 2013 mais cela demande beaucoup d’organisation. L’organisation se fait sur plusieurs mois, mais si je compile la totalité, je dirais que cela constitue environ deux semaines complètes.

Combien d’élèves ont participé ?

29 élèves de 4e et 3e ont participé au stage du mois de juin, dont 22 de REP+,4 de REP et 3 qui ne venaient pas de réseau d’éducation prioritaire.

Comment avez-vous sélectionné les participants ? Pourquoi avoir choisi des élèves de REP+ ?

Je veux des élèves de REP+ non pas pour leur faire « faire des maths » mais je veux les faire baigner dans un bain culturel et leur montrer ce que je montre à mes enfants. Pour cela je travaille avec un inspecteur d’académie et avec le collège de Creil, pour lequel j’ai suivi des élèves de la 6e à la 3e.

Pouvez-vous nous présentez brièvement les intervenants du stage ?

J’ai de la chance dans mon entourage d’avoir des collègues sensibles à la question de la vulgarisation. J’ai donc pu avoir un collègue qui intervenait en informatique, avec un robot. Une autre de mes collègues faisait une intervention en « informatique musicale », elle faisait faire aux élèves des compositions musicales à l’aide de boucles, sur scratch. Il y a aussi eu une session astronomie avec un Solarscope pour observer les taches solaires. En support, il y avait quatre étudiants, en 3ème années, qui étaient sous contrat étudiant qui participaient à l’animation des ateliers.

Ça permet de faire le lien entre les chercheurs et le secondaire. Les élèves rencontrent des étudiants, les questionnent sur leur vie, passion etc.  et des doctorants aussi. C’est important car ils viennent d’un milieu où il n’y a pas forcément d’étudiant dans la famille et un docteur est automatiquement un médecin…

Est-ce que les élèves ont eu une préparation particulière ? Auront-ils un « suivi » post-stage ?

On ne fait pas de suivi de cohorte car c’est très compliqué à mettre en place. Nous avons en 2016 élaboré un questionnaire mes collègues et moi mais là  nous n’avons pas pu faute de temps. J’ai demandé aux principaux des collèges de me faire un retour et j’ai même reçu un mail de la part d’un des participants.

Quand intervenait l’utilisation de Mathador pendant votre stage ? Quelles observations avez-vous pu faire pendant son utilisation ?

Nous avons utilisé Mathador (jeu Mathador Flash et applications) pendant les temps plus calmes.

Nous avons joué à Mathador dès le 1er jour. Beaucoup d’élèves ne se connaissent pas. Pendant la partie, ils sont nombreux à ne pas marquer pas de point, à ne pas trouver pas de calcul alors que deux élèves d’un autre collège ont trouvé un coup Mathador.

Le soir à l’internat, les élèves sont allés voir la personne qui les encadrait pour lui demander comment cela se faisait-il. Elle leur a répondu qu’il ne fallait pas baisser les bras et continuer de chercher même si on ne trouve pas une solution immédiatement. Le lendemain, sur un calcul simple, la moitié du groupe trouve un coup Mathador. Durant la suite du séjour, quand la partie de Mathador était lancée ils demandaient un entrainement. Et je lançais une compétition : les élèves étaient très concentrés, faisaient des calculs, des recherches. On faisait un classement mais il n’y avait pas de récompense. Ensuite nous discutions les résultats trouvés.

Avez-vous exploité uniquement les tirages ou également les applications Chrono et Solo ?

Je suis intervenu dans une classe de cm2 où j’ai pu récupérer des tirages Mathador, j’en avais également certains que j’avais fabriqué. C’est avec ça que l’on jouait pendant le stage. Pour être sûr qu’il y ait un coup Mathador je prenais ceux que j’avais fabriqués.

Quelles remarques ont fait les élèves participants ?

Au départ, ils n’étaient pas à l’aise confrontés à un échec. Ils ont persévéré le lendemain, l’émulation a fait qu’ils « en voulaient ». Ils ne comprenaient pas forcément la méthodologie « je me sécurise en trouvant un calcul et après je vois comment je peux faire mieux ».

J’ai ajouté d’une règle : si celui qui avait le plus haut score annonçait une opération fausse, il perdait le nombre de point qu’il aurait dû gagner. Ça forçait les élèves à vérifier. Ils aimaient bien la phase d’entrainement avant la « compétition ». J’ai insisté sur le fait de trouver un calcul plus que le coup Mathador. Ils ont aussi apprécié le fait que ça soit une activité brève.

Le 1er jour les calculs étaient présentés n’importe comment : aucune parenthèse, sur une même ligne. J’ai insisté sur « un calcul par ligne », qu’ils ont bien compris. Ils n’expliquaient pas forcément, par contre on leur demandait comment ils pouvaient améliorer leur solution. Ce que j’aime bien dans le concours Mathador organisé par Réseau Canopé pendant l’année, c’est que vous prenez la moyenne de la classe, ce qui veut dire que pour que la classe progresse. Les élèves sont obligés de s’échanger des techniques et explications. J’affichais un grand compteur de 3min, ils insistaient pour avoir plus de temps et pour trouver le Mathador.

Un grand merci à Fabien Durand pour sa disponibilité !

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