Le jeu, un outil pour se fabriquer son répertoire mental

Au-delà des jeux présentés dans ce billet, mon objectif est aussi d’essayer de vous convaincre de l’importance de la constitution pour chaque élève d’un répertoire mental en lien avec les mathématiques.

 

Jeux mathématiques et répertoire

On évoque très souvent le répertoire linguistique qui doit se constituer et s’enrichir dès l’école maternelle. On établit clairement une corrélation entre l’étendue d’un répertoire linguistique et la capacité à formuler et à communiquer de façon claire sa pensée. Ce principe de bon sens est désormais bien identifié et souvent évoqué par les cadres de l’Éducation Nationale. Il y a un parallèle avec les mathématiques.

Sans un répertoire mental minimum de nombres et de liaisons opératoires entre ces nombres, un enfant puis un adulte est très rapidement bloqué dans la moindre tâche qui demande de la réflexion en lien avec le calcul. Comme l’expliquent très bien les neuroscientifiques, et notamment Stanislas Dehaene, il y a saturation de la mémoire de travail. Cette dernière est limitée et si un élève bloque sur des calculs simples, il ne pourra pas accéder à des niveaux supérieurs de réflexion. Or, très souvent, un problème mathématique est un enchaînement de pas de raisonnement, à l’image du raisonnement hypothético-déductif. Sans ce répertoire minimum, de nombreux élèves restent bloqués dès le premier pas, alors que celui qui a acquis une aisance et une fluidité mentale en sera déjà à la 3èmeou la 4èmeétape.

C’est ce phénomène que nous sommes nombreux à vivre dans nos classes. Je pense à un souvenir récent vécu dans une de mes classes de 6ème. Une élève, en difficulté forte, bloquait sur 6+4 et a éprouvé le besoin de sur compter avec ses doigts en partant de 6 doigts levés pour arriver à obtenir le 10. Résultat dont elle n’était pas totalement sûre puisqu’elle m’a demandé confirmation. Comment une élève de 6ème qui n’a pas automatisée 6+4 en 10, pourra-t-elle traitée un problème avec un peu de proportionnalité, appliquer un pourcentage, évaluer mentalement un périmètre ou une aire ? La réponse est dans la question …

Je crains que cette élève ne soit pas qu’un cas isolé, mais plutôt le reflet d’un problème plus profond. Pour de multiples raisons, l’enseignement du calcul s’est centré sur les techniques opératoires écrites qui ne produisent pas de sens. Et ce, au détriment de la mentalisation de la relation aux nombres, et aux opérations qui devraient être un préalable au passage à l’écrit.

Il ne faut pas focaliser sur la dernière étude TIMMS de décembre 2020, pas plus que sur les autres études nationales et internationales. Chaque étude a ses particularités et des angles de critiques possibles. Ce qu’il faut retenir, c’est la convergence de toutes ses études. Et, que l’on regarde avec une loupe nationale ou internationale, les performances et les résultats de nos élèves français sont en constante baisse depuis une vingtaine d’années.

Les leviers pour sortir de cette situation sont multiples : investir davantage dans l’éducation, améliorer la formation des professeurs, rendre attractive la profession en améliorant les rémunérations.

Mais il y a aussi des réponses pédagogiques et didactiques. Accentuer la mentalisation de la relation aux nombres et aux opérations avec plus de régularité, de répétition et de verbalisation dans la pratique du calcul mental réfléchi est un axe majeur. Développer la place du jeu dans l’enseignement des mathématiques en est un autre.

Les atouts pédagogiques du jeu sont nombreux. Il facilite l’entrée dans les apprentissages et, si sa consistance pédagogique est solide, il entretient dans la durée cette liaison avec les apprentissages. Les sollicitations pour un élève du XXIe siècle sont tellement nombreuses que l’introduction d’une dose suffisante de ludique et d’attractif dans l’enseignement est désormais incontournable. Il s’agit ensuite pour l’enseignant de construire un scénario pédagogique dans lequel le jeu aura son entière place avec une valeur ajoutée pédagogique claire.

L’association jeu et numérique est un cocktail puissant pour la mise en place d’un scénario dont l’objectif est l’installation d’un répertoire. Dans le domaine des nombres et du calcul, j’ai régulièrement eu l’occasion de citer dans ce blog Calculatice, Trio, Mathador Chrono et Mathador Solo. Voici quelques autres jeux issus de www.jeuxmaths.fr pour constituer ce répertoire.

Fractis

Sur le principe d’un Tétris, comme Quadricalc sur Calculatice, Fractis propose de faire correspondre des écritures différentes d’un même nombre. On retrouve l’écriture en fraction, l’écriture décimale et un dessin-partage. Il suffit de déplacer les carrés qui descendent avec les flèches du clavier pour « viser » une écriture égale.

Les points s’additionnent, l’objectif est d’obtenir le plus de points en faisant durer la partie. La partie s’arrête dès qu’un carré ne peut plus descendre.

La répétition due au principe même de Tétris d’un tel jeu créé les conditions d’un travail de gamme. Avec Fractis, répétitif rime avec attractif et le répertoire peut se construire.

Le bon angle

Le répertoire peut et doit aussi se construire dans le domaine des grandeurs géométriques. La notion d’angle et de mesure d’angles est abstraite pour les élèves. Le jeu « Le bon angle » propose d’évaluer à l’œil des mesures d’angles. Il permet donc de se fabriquer un répertoire d’images mentales d’angles. Comme pour Fractis, il faut essayer d’obtenir le plus de points. 10 angles sont à évaluer, 100 points sont attribués en cas d’évaluation parfaite et 1 point est retiré pour l’écart de chaque degré.

 

 

 

 

 

 

 

Petit Dragon

Le jeu Petit dragon propose de travailler le répertoire des formules de périmètres de figures simples. L’habillage ludique est un petit dragon qui crache des flammes. Il faut viser le bon périmètre. Ce sont les flèches du clavier qui permettent le déplacement du dragon, la barre espace permet de cracher le feu !
C’est encore un système de points et il faut essayer d’en obtenir le maximum. Il existe une version du Petit dragon pour les formules d’aires sur le même principe de jeu.

Jouer avec les objets mathématiques, le moyen idéal pour lutter contre le caractère anxiogène des mathématiques et se fabriquer un répertoire mental le plus riche possible d’objets mathématiques.

Il ne vous reste plus qu’à tester !

 

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