Le calcul mental à l’envers, qu’est-ce que c’est ?

En calcul mental, nous procédons souvent « à l’endroit » c’est-à-dire en cherchant le résultat d’une opération donnée. Ce calcul qu’on dit direct est celui dont a besoin tout citoyen. Mais pour apprendre et développer ses capacités en calcul, la pratique qu’on dit « à l’envers » est très efficace.

Petit tour complet du fonctionnement et des apports de ce calcul de type compte est bon.

Les deux types de calcul mental

Dans un précédent billet intitulé Les deux types de calcul mental, nous rappelions que le calcul mental que l’on qualifie d’automatisé est celui que l’on a en mémoire, un peu à l’image de ce qui est stocké dans le disque dur d’un ordinateur. Ce sont des résultats à notre disposition immédiate, mais ce peut-être aussi des procédures que l’on automatise. Cette sollicitation est sans effort. Cette partie automatisée se construit progressivement dans le temps, elle est la base du calcul mental réfléchi. Comme son nom l’indique, ce dernier nécessite de la réflexion, des procédures et des stratégies dans lesquelles la partie automatisée pourra intervenir. Le calcul mental réfléchi est proche de la résolution de problème par la diversité des méthodes qu’il peut mettre en évidence.

Le calcul mental direct : une opération / un résultat

5+3=8

Les deux réunis forment une partition personnelle correspondant à nos capacités en calcul mental direct : une opération, un résultat attendu. Cette partition est évolutive car elle est en construction dès les premières années et elle s’enrichit tout au long de la vie en fonction de la régularité et de l’intensité de notre relation avec les nombres et les opérations.

Plus la partie automatisée est développée, plus cela libère de l’énergie pour développer la partie réfléchie. Le calcul mental réfléchi du cycle 1 va progressivement devenir du calcul mental automatisé au cycle 2, le réfléchi du cycle 2 deviendra une partie de l’automatisé du cycle 3 et du collège…

En résumé, le calcul mental direct est celui dont le citoyen a besoin : évaluer le montant de ses courses, estimer une réduction d’un prix en pourcentage, estimer un périmètre ou une aire… Il est essentiel et simple à définir : je dispose de nombres que je combine entre eux avec les 4 opérations et j’obtiens un résultat.

Le calcul mental à l’envers, kesako ?

cible : 61- nombres à utiliser :2,4,6,7,9En quelques mots, le calcul mental à l’envers, c’est le concept universel du « Compte est bon » : des nombres sur lesquels on opère avec les quatre opérations de façon à fabriquer un nombre cible.

En complément d’une pratique classique du calcul mental direct, le calcul mental à l’envers est un très bon exercice pour donner du sens au calcul mental direct. Ce dernier change de statut : il devient outil au service de la fabrication du nombre-cible. Les connaissances en calcul mental direct notamment automatisé sont un vrai plus.

Il est important de rappeler qu’en calcul mental à l’envers comme en calcul mental direct, on retrouve la dichotomie automatisé et réfléchi.

En effet, 25 peut déclencher automatiquement un 5×5 dans votre cerveau mais 91 ne déclenchera pas toujours un 7×13 !

Dans ce cas, le premier est du calcul mental à l’envers automatisé et le second est du réfléchi.

Quel est l’intérêt pédagogique de ce découpage du calcul mental entre direct et à l’envers ?

La gymnastique de l’esprit occasionnée par la pratique du calcul mental à l’envers est une clé pour la perception des ordres de grandeur, du sens des nombres et du sens des opérations. En effet, le nombre-cible est consciemment ou inconsciemment analysé avant de chercher à l’atteindre. L’objectif de fabriquer ce nombre-cible rend acteur. L’ « automath » qui récite par coeur ses tables de multiplication ne peut pas fonctionner !

Prenons un exemple.

Pour fabriquer 63 :

Solution 1 : je peux solliciter du calcul mental automatisé comme 7×9 ou 3×21 ou du semi-automatisé comme 6×10+3 ou 7×10-7

Solution 2 : je peux aussi utiliser du calcul réfléchi comme 5×12+3, 5×13-2, 7×8+7, 8×8-1 ou 5×14-7…

Donner du sens

Les allers-retours entre réfléchi-automatisé et direct-à l’envers sont permanents et favorisent une véritable construction de sens dans la relation aux nombres et aux opérations, ils créent des liens entre sens et technique et donnent de l’épaisseur aux nombres. Cette pratique stabilise et enracine les connaissances en calcul mental direct. Ce travail de décomposition des nombres pour fabriquer le nombre-cible est créateur de sens.

Les décompositions font intervenir principalement addition, soustraction et multiplication comme le montre l’exemple du 63 ci-dessus. La division moins utilisée, car plus complexe, pourra intervenir sur des exemples du type (14×9):2 ou (9×21):3.

Ces multiples décompositions dans la recherche du nombre-cible avec des tests et du tâtonnement raisonné constituent un vrai travail sur les ordres de grandeur, autre clé du sens du nombre.

Dépasser l’idée de chemin unique du calcul mental

Cette pratique de recherche d’un nombre-cible est à mettre en place de façon méthodique et organisée dans le cadre de la classe car c’est un principe non naturel.

Il va à l’encontre de la pratique habituelle numérique plutôt portée vers le calcul direct. Le début peut donc être difficile car cette nouvelle gymnastique nécessite une période de mise en place de ces nouveaux mécanismes mentaux.

Pour certains élèves, la logique habituelle « une opération, un résultat » s’apparente à un formatage très fort et il induit l’idée fausse du chemin unique pour obtenir un résultat opératoire. La mise en lumière de chemins variés en calcul direct combinée avec la gymnastique de la pratique du calcul mental à l’envers est alors riche de sens et permet de dépasser cette vision réductrice et fausse du chemin unique en calcul.

Pratiquer le calcul avec plaisir et motivation

Autre atout fort du calcul mental à l’envers : un ressort ludique quasi naturel. Il réside dans la combinaison de la notion de défi et de la volonté d’atteindre et de fabriquer ce nombre-cible. Objectif apparemment simple puisqu’il ne s’agit que de décomposer et recomposer quelques nombres pour en fabriquer un autre !

La régularité dans cette pratique du calcul mental l’envers est essentielle de façon à laisser du temps pour s’approprier cette gymnastique et l’installation de ces mécanismes nouveaux. Cette fréquentation des nombres avec des allers-retours opératoires entre direct et à l’envers permet de cultiver à la fois le plaisir et l’effort intellectuel par une forme de jubilation dans le jonglage numérique. C’est aussi une façon de poser les fondations d’une relation amicale et apaisée avec les nombres qui pourra par la suite, diffuser dans toutes les activités numériques.

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